TRIBUNE. « Plus que jamais la France et l’Union Européenne ont besoin d’un président pro-européen » – Le Journal du dimanche

11h00 , le 16 avril 2022
Guillaume Klossa, est fondateur d’EuropaNova, ancien conseiller spécial de la présidence de la Commission européenne et écrivain. Son prochain ouvrage s’intitulera « Fierté européenne, manifeste pour une civilisation européenne d’avenir » (Télémaque, mai 2022). Avant le second tour de l’élection présidentielle, il interpelle sur la nécessité d’élire un président pro-européen à la tête de l’État.
Voici sa tribune : « On critique sans cesse l’Union européenne, on pointe son inertie, sa déconnection des réalités des gens. Mais force est de constater que jamais l’Union européenne n’aura aussi radicalement changé que durant ces cinq dernières années et qu’elle aura rarement autant protégé les citoyens européens. En moins de cinq ans, l’Union a rompu avec tous ses anciens dogmes. La Banque centrale européenne a soutenu massivement l’activité économique et l’emploi durant la crise du Covid. La fameuse règle des 3% des déficits publics a été mis entre parenthèse, réalisant ainsi un vieux souhait de la gauche de la gauche européenne. De vieilles idées de gauche et écolo comme celle d’une assurance chômage européenne ou d’un endettement direct de l’Union européenne se sont concrétisées avec la création de SURE, un programme de lutte contre le chômage partiel de près 100 milliards d’euros ou du plan de relance de 750 milliards fondé sur une dette commune. L’Union a également pris le leadership de la transition écologique avec le Green Deal, programme le plus ambitieux au niveau mondial de lutte contre le dérèglement climatique. Enfin, à l’occasion de la guerre en Ukraine, elle est en train d’accélérer un tournant géopolitique majeur amorcé à partir de 2016 avec l’émergence d’une défense européenne rendue possible par le départ des Britanniques de l’Union qui souhaitait que l’Union se contente d’être un vaste marché.
Ces différentes mutations font que jamais, peut-être paradoxalement à l’exception de la France, l’attachement des citoyens européens à l’idée européenne n’aura été aussi élevé depuis la crise de 2008. Jamais aussi les citoyens européens n’auront donné le sentiment d’être prêts à la transformation de l’Union en une puissance démocratique plurinationale et multilingue de rang mondial capable de défendre ses citoyens, ses valeurs et ses intérêts à l’échelle planétaire comme le montrent les recommandations de la Conférence sur l’avenir de l’Europe qui seront officiellement présentés à Strasbourg le 9 mai prochain.
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Jamais aussi les citoyens européens n’auront donné le sentiment d’être prêts à la transformation de l’Union en une puissance démocratique plurinationale
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Dans de telles conditions, comment voter pour une candidate qui prône le repli sur soi et souhaite un démantèlement de l’Union, en commençant par remettre en question la liberté de libre circulation si importante pour des centaines de milliers de français transfrontaliers ? Comment apporter ses suffrages à une candidate qui souhaite sortir la France des politiques énergétiques de l’Union, essentielles à l’heure de la guerre ukrainienne, et récuser à l’instar de la Russie la convention européenne des droits de l’Homme voulue par René Cassin, un très proche collaborateur du général de Gaulle, dans l’immédiat après-guerre afin de protéger les individus contre les dérives nationalistes et populistes des États ? Une candidate qui aurait empêché qu’aucune des transformations majeures de l’Europe de ces dernières années ne puissent advenir parce que contraires non aux intérêts des citoyens mais à l’idéologie de son parti ?
Si Emmanuel Macron n’a pas toujours été à l’initiative des mutations des transformations de l’Europe de ces dernières années, si sa méthode européenne a pu être à juste titre critiquée, force est de constater qu’il a su en tirer parti dans l’intérêt des Français, à commencer par le plan de relance européen qui a évité un effondrement de l’économie de nos principaux partenaires commerciaux que sont l’Espagne et l’Italie et qui par contrecoup aura fait sombrer notre économie. Force est également de constater qu’il a encouragé une stratégie vaccinale européenne, qui a permis à nos concitoyens, à défaut de bénéficier d’un vaccin français, d’avoir accès aux vaccins anti-covid les plus efficaces et les plus sûrs et de reprendre une vie quasi-normale. Il a également favorisé une indispensable unité européenne face à la Russie de Poutine alors que les droites extrêmes auraient abandonné les Ukrainiens à leur sort et auraient occulté les crimes barbares de l’armée russe.
On peut ne pas apprécier Emmanuel Macron, ne pas avoir voté pour lui au premier tour mais considérer que l’Union européenne comme la France ont plus que jamais besoin d’un président qui soit un pro-européen sans ambiguités. Il ne s’agit pas de donner un chèque en blanc au président sortant, mais simplement de faire le meilleur choix dans l’intérêt d’un pays qui est moteur du projet européen depuis sept décennies et qui a mis l’Europe au cœur de son identité nationale. »
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