Rencontre avec Dominique Faesch – «Il ne suffit pas d’attendre qu’un mandat se présente» – Bilan

Dominique Faesch, EHL, MBA a présidé le Cercle Suisse des Administratrices depuis 2018. Avec son Comité elle s’est appliquée à augmenter la visibilité des excellents profils professionnels de ses membres, pour leur meilleure accessibilité aux conseils de fondation et d’administration.

Et contrairement à certaines idées reçues, il ne suffit pas d’attendre qu’un mandat se présente, c’est à chacun-e d’entamer son processus de candidature et de gérer le suivi de ses démarches.

Qu’est-ce qui vous intéresse le plus dans cette fonction?

La fonction m’intéresse tout particulièrement pour l’opportunité qu’elle offre, de participer à la performance et à la création de valeur d’une entreprise, un engagement à chaque fois unique.

Les échanges avec nos membres administratrices m’incitent à dire qu’il y a autant de formes de conseil qu’il y a d’entreprises. Dans le passé la fonction du conseil restait souvent confidentielle, évoquée lors de l’AG ou en cas de problème. Mais aujourd’hui managers et actionnaires reconnaissent le rôle d’une gouvernance de conseil d’administration ou de fondation performante, indispensable à la bonne marche de l’entreprise. Leur responsabilité juridique nécessite des administratrices et administrateurs conscients et concernés par leurs engagements.

Quelles sont les compétences clés et la valeur ajoutée que vous apportez au CA?

Curiosité, écoute, intérêt pour le monde des affaires, rapportés à un parcours international et multiculturel, me permettent de poser des questions perspicaces, destinées aux membres de la direction, et d’estimer l’impact opérationnel de leurs réponses.

Au sein du Cercle Suisse des Administratrices nous accordons une attention particulière aux compétences nécessaires au bon fonctionnement d’un conseil, que nous transposons en ateliers de formation. La responsabilité du conseil envers les parties prenantes de l’entreprise, la sensibilisation du monde des affaires aux problématiques actuelles, que le conseil doit aborder pour insuffler des mouvements stratégiques, font partie des missions du Cercle (cyber sécurité, RSE, responsabilité sociétale et environnementale, en sont deux exemples).

Quelles sont les difficultés de cette fonction, les défis que vous avez rencontrés?

Je dirais que c’est une activité «éclair», qui requiert une bonne capacité d’adaptation! Les 4 à 5 séances organisées sur l’année nécessitent de s’y bien préparer. La transmission aux équipes opérationnelles exige clarté, précision et conviction, que ce soit pour des propositions ou lors de la détection d’un feu orange dans les rapports ou dans l’environnement externe. Il convient de bien choisir ses propos, imagés mais percutants, d’utiliser quelques brins d’humour bien sélectionnés, mais aussi d’écouter. Les premiers pas sont quelques fois étonnants de solitude, mais que l’on soit femme ou homme implication, constance, clairvoyance et éthique sauront faire la différence.

Quelle est votre meilleure bonne pratique en termes d’obtention de mandat dans les CA?

Ce que je recommande aux personnes en recherche de mandats d’administrateur, c’est essentiellement de bien choisir leurs réseaux de pairs dans lesquels elles ou ils pourront faire connaître leurs compétences et échanger sur les tendances et les bonnes pratiques de gouvernance. Le Cercle est l’un de ces réseaux. Les mandats sont restreints et je leur conseille d’identifier des sociétés dans lesquelles elles ou ils pourront participer de manière créative, des secteurs d’affinités avec leurs parcours professionnels, ou dans lesquels leurs compétences sont actuellement manquantes. S’ensuit un processus de démarchage qu’il convient d’entreprendre stratégiquement, sachant qu’une grande partie des conseils recrutent au sein de leurs réseaux.

Que manque-t-il pour que les CA d’entreprises suisses comptent davantage de femmes?

La problématique mériterait d’être traitée de manière holistique, mais voici trois niveaux actionnables:

a) au sein des collèges, pour participer à une intelligence collective, la diversité doit être gérée par des présidents-es orientés création de valeur. Si concurrence il y a, entre les personnalités d’une équipe, elle doit être saine, respectueuse et constructive.

b) les candidates doivent être conscientes de leur légitimité à siéger dans un conseil, et du temps qu’elles devront y consacrer. L’ACAD, la Swiss Board School, entre autres, sont des formations continues indispensables pour adapter ses compétences au fonctionnement d’un conseil. Et pour maîtriser une fonction il faut la pratiquer, accepter au début d’entrer en zone d’inconfort.

c) pour les jeunes générations de managers, elles doivent être sensibilisées aux conditions d’accession au dernier échelon d’une entreprise, aux compétences et aux formations utiles.

En Suisse, et dans le monde, la diversification des conseils évolue au gré des turnovers annuels, c’est-à-dire lentement. Mais les nombreuses communications d’une association comme le CSDA, et notamment l’attribution annuelle du Prix du Cercle, permettent d’affirmer que de plus en plus d’entreprises adoptent une politique exemplaire. Le jour où les effets de la diversité sur la performance seront scientifiquement prouvés… cette question ne se posera plus.

Publié aujourd’hui à 11h30

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